Assurance chômage : construire un nouveau système

Rédigé le 20/12/2023


Dans une tribune, Jean-François Foucard, secrétaire national CFE-CGC aux parcours professionnels, revient sur la récente négociation assurance chômage et en appelle à un nouveau cahier des charges.

Pour la CFE-CGC, la récente négociation assurance chômage a signé la fin d’une époque, celle de la gestion paritaire du régime telle que conçue en 1958. D’une philosophie d’indemniser le mieux possible le chômeur pour le sécuriser, nous sommes passés à celle de le pousser le plus rapidement possible sur le marché de l’emploi pour augmenter coûte que coûte le taux d’activité, nouvel alpha et oméga de la Macronie.

En effet, cette négociation entre partenaires sociaux, comme celle de 2019, a dû se soumettre au cadre créé par la loi de 2018 qui introduit la notion de lettre de cadrage de la part du gouvernement, laquelle doit être absolument respectée pour que l’accord conclu entre organisations syndicales et patronales puisse être agréé.

Dans cette lettre de juillet 2023, la liste des obligations était très fournie : reprendre les dispositions introduites par les lois de 2019 et 2022, à savoir le mode de calcul de l’indemnité qui moyenne les salaires perçus sur la période couverte, la fluctuation de la durée d’indemnité en fonction de la conjoncture économique (principe de contracyclicité) et la dégressivité qui entraine une baisse de 30 % des indemnités à partir du septième mois pour les chômeurs dont le salaire initial est supérieur à 4 800 euros. Il s’agissait également de faire évoluer la réglementation pour prendre en compte l’impact de la loi sur les retraites, que toutes les évolutions de dépenses soient compensées, que la somme disponible pour les indemnisations baisse de près de 10 % sur la période de la nouvelle convention afin de financer France Travail et l’apprentissage, et que les excédents servent à désendetter le régime. Vous conviendrez que les marges de manœuvre étaient déjà ténues ! Mais comme si cela ne suffisait pas, la partie patronale a imposé dès le départ une baisse minimale de cotisation de 0,8 %. In fine, il fallait gérer le tout avec 11 % de moins de recettes dédiées et avaliser les reformes combattues !

La seule voie de passage était de faire un accord politique à 8 (les 5 organisations syndicales et les 3 organisations patronales) et de ne pas respecter certaines consignes. C’est sur cette base que l’ensemble des partenaires sociaux ont engagé la négociation.

LA DÉGRESSIVITÉ DES ALLOCATIONS, POINT D’ACHOPPEMENT POUR LA CFE-CGC

Pour la CFE-CGC, la suppression de la dégressivité des allocations était clairement l’objectif de cette négociation. Nous avions été confortés dans notre volonté par la Première ministre elle-même lors d’un entretien le 12 octobre. Malheureusement, la négociation assurance chômage a été percutée de plein fouet par celle sur l’Agirc-Arrco et le psychodrame qui s’en est suivi.

La partie patronale a basculé d’un accord politique vers un accord gestionnaire respectant strictement la lettre de cadrage du gouvernement. Aussi, le Medef, seule organisation à avoir défendu l’introduction de la dégressivité (pour limiter les ruptures conventionnelles à l’initiative du salarié dans les grandes entreprises, tiens, tiens…), a refusé d’enlever le principe du dispositif.

C’est pourquoi la CFE-CGC, qui avait quitté la table des négociations le 10 novembre, a décidé à l’unanimité de son comité directeur du 15 novembre de ne pas signer le texte proposé. C’est seulement la deuxième fois de son histoire que cela arrive, après le refus de 2014 suite à l’introduction du différé d’indemnisation basé sur les indemnisations perçues de licenciement.

Pour la CFE-CGC, la suite ne peut désormais s’écrire que par la reprise de l’autonomie des partenaires sociaux via la création d’une complémentaire chômage avec cotisation salariale et patronale, sans possibilité d’exonération, et en laissant le socle de l’indemnisation à l’État. Cela devrait être le cahier des charges de la prochaine négociation sur la gouvernance chômage prévue pour 2024.

Jean-François Foucard, secrétaire national CFE-CGC en charge des parcours professionnels

Source : cfecgc.org